Ce n’est qu’une étape dans ce procès hors norme qui n’est dépassé que par celui organisé à Palerme en 1986-1987 contre la Cosa Nostra sicilienne. La justice italienne a condamné, samedi 6 novembre, 70 membres de la ’Ndrangheta et d’autres personnes ayant des liens avec elle, portant un coup dur à la ’Ndrangheta, le groupe mafieux le plus puissant d’Italie.
Le juge Claudio Paris a lu les verdicts rendus à l’endroit de 91 accusés dans l’immense salle d’audience de la ville de Lamezia Terme, en Calabre, où avait lieu, depuis janvier un « maxi-procès », celui de centaines de membres présumés et collaborateurs du syndicat du crime organisé ’Ndrangheta. Les 91 personnes qui viennent d’être condamnées avaient opté pour un procès rapide, à huis clos, qui leur permettait, en cas de condamnation, de voir leur peine amputée d’un tiers.
Jusqu’à 20 ans de prison
Le célèbre procureur antimafia Nicola Gratteri – que ses efforts pour vaincre la ’Ndrangheta ont contraint à vivre sous protection policière pendant plus de trente ans – a déclaré que tout s’était « très bien » passé samedi. « Sur 91 accusés, 70 innocents présumés ont été condamnés », a-t-il déclaré à l’agence de presse italienne AdnKronos, ajoutant que les personnes acquittées étaient des acteurs mineurs. Certains se sont vu infliger la peine maximale de 20 ans requise par les procureurs.
Il s’agit notamment de Domenico Macri, de la branche militaire du groupe, de Pasquale Gallone, le bras droit du chef présumé de la mafia Luigi Mancuso, dont le procès est toujours en cours, et de Gregorio Niglia, qui avait, en particulier, pour rôle de se procurer des armes et de se livrer à des extorsions. Environ un tiers de ce groupe a été condamné à des peines de dix ans ou plus et 21 personnes ont été acquittées, a dit M. Gratteri.
Des huit pour lesquels l’accusation avait requis 20 ans de prison, six ont reçu la totalité de cette peine, dont Pasquale Gallone, 62 ans, qui a aidé à orchestrer les trois années de cavale de son patron à partir de 2014, alors que, depuis deux ans, Luigi Mancuso était sorti de prison, où il avait passé dix-neuf ans.
Les principaux accusés ont toutefois opté pour un procès normal, à savoir Luigi Mancuso « l’Oncle », 67 ans, considéré comme le chef des familles de la ’Ndrangheta qui dominaient la province de Vibo Valentia en Calabre, et l’ex-sénateur et avocat Giancarlo Pittelli, 68 ans.
Plus de 350 accusés appelés à être jugés
Quelque 355 accusés doivent encore être jugés, la procédure étant prévue pour deux ans ou plus. Les enquêtes ont pris plusieurs années et ont culminé avec des raids effectués en décembre 2019.
La ’Ndrangheta, basée en Calabre, la région la plus pauvre d’Italie, contrôle la majeure partie du flux de cocaïne qui entre en Europe. Ce réseau d’environ 150 familles qui se disputent les postes au sein de l’organisation compte au moins 6 000 membres et affiliés en Calabre et des milliers d’autres personnes le soutiennent dans le monde entier, selon les experts.
Bien qu’elle agisse désormais au niveau international et que ses gains soient réinvestis dans l’économie légale, la capacité de la ’Ndrangheta à infiltrer presque tous les segments de l’administration publique en Calabre lui a permis d’obtenir des contrats lucratifs et de consolider son pouvoir.
Les accusés condamnés samedi devaient notamment répondre d’association mafieuse, de tentative de meurtre, de blanchiment d’argent, de trafic de drogue, d’extorsion et de possession illégale d’armes.
Le maxi-procès se déroule dans une immense salle d’audience capable d’accueillir les centaines d’avocats défendant leurs clients et les plus de 900 témoins à charge et les 58 témoins à décharge. Le légendaire maxi-procès de 1986-1987 avait, pour sa part, porté un coup dur à la Cosa Nostra sicilienne, avec 338 condamnations.
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